Notes de pluie et gouttes de piano. [ PV Nils ]

Le Banquet de début d'année était déjà fini. Comme d'habitude, on avait bien mangé, bien bu, à coups de pommes de terre et de récits de vacances. Les élèves que le nouveau Directeur avait 'déménagés' étaient restés un peu plus silencieux que les autres, parce qu'ils venaient de toutes les Maisons, si différentes les unes des autres. Lizzie avait failli s'étouffer avec un morceau de pomme lorsqu'elle avait remarqué que se trouvaient à sa nouvelle table une personne qu'elle méprisait profondément : Alpha-machinchose Brumed. Mon dieu ! Qu'est-ce qu'il faisait ici, lui ?! Elle avait senti la colère monter et, pour cacher son trouble, avait bu un grand verre d'eau glacée. Pendant le discours de Fabulous Farfadus, cet étrange phénomène, elle avait été très attentive.
Puis, enfin, les élèves avaient dû monter à leurs Salles Communes respectives. La jeune fille avait précédé les autres en suppliant les escaliers de faire au plus vite, et elle était arrivée sans encombre au Troisième Etage. La Salle Commune était jolie, décorée avec goût. Ce nouveau Directeur ne s'était pas moqué d'eux. Lizzie s'était précipitée vers le dortoir, s'était changée en vitesse - elle n'aimait pas du tout la robe de sorcière qu'elle avait revêtu pour la Cérémonie - et était montée aussi vite que possible au Septième Etage, entortillant ses longs cheveux bruns en un chignon serré.

Lorsqu'elle arriva dans le Couloir où se trouvait l'entrée de la Salle de Danse, l'adolescente hésita un peu. Sa mémoire lui jouait encore un tour et l'interrogea ironiquement : la porte de "sa" pièce, était-ce celle de gauche ou celle de droite ? Penchant un peu la tête sur le côté, elle contempla les deux portes closes, puis opta pour celle de droite. Elle s'avança, défroissa la robe légère qu'elle avait revêtu, et poussa le battant de bois. Fronçant les sourcils, elle s'aperçut que celle-ci était verrouillée. Elle tira sa baguette de son sac et lui fit décrire sèchement une sorte de cercle, le poignet arrogant et le regard impatient :

"Alohomora !"

Enfin, la porte s'ouvrit et Lizzie pénétra dans cette Salle... qui, bien sûr, n'était pas la bonne. La brunette soupira à fendre l'âme, tandis que s'insinuait en elle cette pensée pessimiste :

*Décidément, je n'aurais pas de chance jusqu'au bout, aujourd'hui...*

Elle s'apprêtait à faire demi-tour, quand une douce mélodie s'éleva, provenant apparemment d'un coin de la pièce. Tournant son regard bleuté vers cet endroit, elle remarqua avec surprise un piano dont les touches noires et blanches dansaient seules - sans pianiste aucun. Ses yeux s'écarquillèrent. Décidément, le monde de la Magie était bien surprenant, même lorsqu'on en avait connaissance depuis sept ans...
La pièce, plongée dans l'obscurité, ne laissa pas à la brunette le loisir de tout voir. Mais une minuscule fenêtre éclaira faiblement un tas de feuillets couverts de petits signes noirs éparpillés sur une table basse. Etonnée, Lizzie s'avança vers ce tas de papier, et, comme elle se penchait pour mieux voir, un sourire vint orner ses lèvres rosées. Des partitions. Elle était tombée dans une salle de Musique.
Cette constatation la plongea dans une réflexion des plus profondes. Pourquoi ne l'avait-elle jamais remarquée auparavant ? Peut-être qu'Albus Dumbledore avait une préférence pour la Danse, alors que Fabulous Farfadus, lui, aimait tout particulièrement la Musique... Non pourtant, cette explication ne tenait pas debout ; il était de notoriété publique que l'ancien Directeur était un fervent admirateur de l'Art d'Euterpe. Lizzie n'avait tout simplement jamais prêté attention à la Porte de Droite.

Dans le coin de la pièce, la mélodie se faisait plus vive, plus malicieuse, à croire que le piano lui-même voulait que l'adolescente reste pour l'écouter. Elle eut un léger rire, et, d'une voix joyeuse, elle répondit à l'instrument :

"Désolée, Monsieur Piano, mais ce n'était pas votre jolie demeure que je me proposais de visiter. Je me rends chez votre voisine. Merci pour ce délicieux récital, et peut-être à bientôt !"

Elle esquissa une gracieuse révérence à la manière Classique, puis, se redressant, elle fit volte face... Pour tomber sur un jeune homme qui l'observait avec un certain étonnement.
Les fins sourcils de la jeune fille se froncèrent. Ce garçon, elle ne l'aimait pas dès à présent. Elle le connaissait de vue et de réputation : un Serpentard, Septième Année si sa chère mémoire ne la trompait pas une fois de plus, très sportif, hautain et taciturne. Avec un léger sourire poli, elle darda sur le nouveau venu un regard indifférent et s'adressa à lui d'une voix dénuée de tout intérêt :

"Oh, bonjour. Je ne t'avais pas entendu arriver."

Puis elle s'avança vers le jeune homme, qui tournait le dos à la porte, pour le contourner et quitter la pièce. Mais ce fut la voix de Nils qui la retint, ainsi que le silence soudain, laissé par le piano qui s'était tu.

"Ce piano n'est pas seulement un simple objet magique.Je suppose que tu sais que le Choixpeau a sa propre opinion et conscience.Ce piano est pareil.Il avait un nom autrefois, mais je ne m'en souviens plus.Les autres non plus d'ailleurs.On l'a nommé le Piano de L'Oubli , du coup.C'est la première fois qu'il joue depuis longtemps.Ou alors, c'est toi qui l'a touché ? Pourtant, excuses moi de mon impertinance , mais tu n'as pas du tout l'air d'une si grande musicienne."

Nils, lui , du premier coup , a bien aimé la jeune fille.La sensation de froid polaire du grand Nord qui s'échappait d'elle leur était commun à tout deux.Une sorte d'indifférence, d'insensibilité qui leur permettait de survivre.Leur seule façon de se protèger.Nils supposa instinctivement que les prétendants de la jeune fille devaient se bousculer au portillon.Tout en elle exprimait l'inaccessible, et même corporellement elle était parfaite , quoique d'une taille raisonnable.

Lentement , le jeune homme fixa le sol.Il n'y entrevut que les fines mains ciselées de la jeune fille.Ceux-ci n'étaient pas rongés comme les siens.C'était des doigts , là encore, parfait.Globalement, on sentait que la jeune fille cherchait en permanence à tendre vers la perfection.
Il releva la tête et constata que le regard violet surnaturel était également empreint de dégout.Le jeune homme haussa les épaules.On ne peut pas plaire à tous...

Même si il aurait bien aimé la connaitre plus.Il aimait cet air hautain qu'avait la jeune fille.Après tout, qu'aurait-elle pu faire ? Nils n'aime que lui et ne s'interesse qu'à lui.Alors , fatalement, les rumeurs sont allées de bon train.Il y en avait même une qui contait que le jeune homme était dépourvu de coeur , que si l'on essayait de lui ouvrir les entrailles, on y trouverait que du vide.

Nils souria en repensant à cette rumeur stupide.Elle n'était pas si éloignée de la réalité, tout compte fait.

"Je vois à ta grimace de mépris que tu connais déjà mon nom.J'ai donc pas à me présenter, une chose inutile d'évitée.Je brule d'envie de savoir le tien , par contre...

Inutile de jouer au chat et à la souris.Je crois que j'ai compris que nous nous ressemblons beaucoup , n'est ce pas , Miss ... "?

[Requiem For A Dream > Summer ouverture]

Lizzie était déjà face à la porte, quand la voix de Nils la rattrapa. Il racontait des choses étranges à propos de ce piano. Conscient ? Il avait un nom ? Le Piano de l'Oubli...

"C'est joli.", souffla-t-elle à mi-voix lorsqu'elle entendit ce nom.

C'était la première fois qu'il jouait... Il avait donc joué pour elle ? Pourquoi aurait-il fait ça ? Ce garçon se moquait d'elle, c'était impossible, pourquoi l'instrument de musique l'aurait-il choisi pour recommencer à jouer ? Ridicule. Dos au jeune homme, elle posa sa main sur la poignée de la porte, et commença à la tourner lorsque la phrase suivante du Serpentard la frappa de plein fouet :

"Excuse moi de mon impertinence, mais tu n'as pas du tout l'air d'une grande musicienne."

Lizzie se retourna lentement vers lui, et répondit d'une voix pensive :

"Non, c'est vrai, je ne suis pas musicienne. Moi..."

Elle s'interrompit un moment, les yeux dans le vague tandis que le jeune homme l'observait. Elle ne s'en rendit pas compte immédiatement et poursuivit alors qu'un sourire doux venait se poser sur ses lèvres :

"... Je suis danseuse."

Instinctivement, elle baissa les épaules, et plaça ouvrit ses pieds en-dehors. Son menton légèrement redressé, elle retrouvait un peu de cette fierté qui faisait sa réputation dans l'Ecole, et observa avec attention Nils. Il la regardait, semblant la détailler sans aucune gêne. Elle fronça les sourcils, se détournant légèrement. Puis elle aperçut son sourire, et l'entendit lui adresser encore une fois la parole :

"Je vois à ta grimace de mépris que tu connais déjà mon nom.J'ai donc pas à me présenter, une chose inutile d'évitée.Je brule d'envie de savoir le tien , par contre..."

Lizzie secoua la tête d'un air ennuyé. Et bien non, elle ne connaissait pas son nom entier. Nils, Serpentard, c'était tout ce qu'elle savait, et elle n'éprouvait absolument pas l'envie d'en savoir plus sur le jeune homme qui se tenait là en face d'elle. Elle réprima un sourire en l'entendant lui avouer qu'il "brûlait d'envie de savoir le sien". Elle ne répondit rien, préférant se réfugier dans un silence indifférent. S'il voulait parler, qu'il parle.
En effet, il poursuivit d'une voix plus directe, et ce qu'il lui lança ne plut pas du tout à la jeune fille :

"Inutile de jouer au chat et à la souris.Je crois que j'ai compris que nous nous ressemblons beaucoup , n'est ce pas , Miss ... ?"

La danseuse fronça les sourcils et sa bouche prit un pli sec. Elle rétorqua d'une voix neutre :

"Lizzie Moonrise. Et il ne me semble pas que nous nous ressemblions."

Elle secoua légèrement la tête et se retourna de nouveau pour partir, lorsqu'une mélodie retentit de nouveau dans la Salle de Musique. Surprise, elle revint sur ses pas, s'approcha du piano et l'effleura du bout des doigts. Elle leva les yeux vers Nils et l'interrogea d'une voix un peu plus douce :

"Et toi... Pour m'avoir dit ça, tu es musicien toi-même, non ?!"

Elle pencha un peu la tête sur le côté, comme un petit oiseau. Une longue boucle brune glissa sur son visage, elle l'écarta d'un geste impatient.
Alors comme ça, les athlètes égoïstes et bornés pouvaient aimer l'art... Mais ne nous précipitons sur aucune conclusion hâtive, attendons au moins la réponse du jeune Grec.

"Lizzie Moonrise. Et il ne me semble pas que nous nous ressemblions.Et toi... Pour m'avoir dit ça, tu es musicien toi-même, non ?!"

Le jeune homme s'approcha de la jeune fille.Dangereusement.Pas après pas.Lentement.Alors elle aussi se déplaça le long du piano , en glissant un doigt contre l'ébène brillant.On aurait dit la ronde de combat de deux fauves agiles se regardant dans les yeux en essayant d'analyser l'autre.

"Je trouve pourtant beaucoup de moi en toi.Est-ce une erreur ? Si c'en est une , comment dois-je la réparer ? Est-ce à moi de la réparer ? Lizzie, tu sais bien que nous sommes pareil.Tu ne peux pas y échapper.Pourquoi tourner ton regard vers cette porte ou cette fenètre ? Qu'est ce que cela t'apportera de me fuir ? Que je sois là ou pas , tu es toujours la même petite fille effrayée..."

Et Nils se détourna.Il alla directement au fond de la pièce.Lentement , les yeux fermés , ses doigts effleurèrent les cordes.Celles-ci , toujours fermes, répondirent immediatement au toucher du jeune homme.Cette harpe était vraiment immense.Mais pas autant que le talent de Nils.La mélodie n'avait plus rien à voir avec l'air guilleret qu'avait joué le Piano de l'Oubli.Cette aria avait quelque chose de fataliste , de destiné , d'écrit.Comme à chaque fois qu'il jouait cet air magique pourtant interdit , Nils sentit des picotement lui remonter le long du dos , puis se diffuser au cerveau et tout le long du corps.

Lentement, comme si rien n'était , il continua de discuter, d'une voix audacieuse, presque insidieuse avec la jeune fille.

"Tu es danseuse , réelement ? Mais alors , que fais-tu dans mon royaume des songes, toi qui es du monde materiel.Que fais-tu dans la maison du Dieu des instruments.... "

Sa voix se fit plus murmurante encore...

"Tout ces instruments sont maudits.Ce sont ceux de la collection personnelle de Salazar Serpentard.On ne peut entrer dans cette salle que lorsque au moins trois planètes du Système Solaire sont alignées.En temps normal, tu aurais déboulé dans une salle de musique totalement normale... Malheureusement pour toi , ce n'est plus le cas... Tu es à ma merci...Ce serait peut-être mieux de coopérer , je peux me montrer très persuasif, tu sais..."

Lentement le jeune homme se leva , et , presque affectueusement, leva une main et caressa du visage la jeune Farfadus... Avant que cette caresse ne devienne une claque magistralement assénée.Un peu de sang était resté sur la main du garçon après le coup.Tout en regardant Lizzie qui était tombée à la renverse , il commença à sucer doucement son sang , lentement...

Quelque chose n'allait pas. Pourquoi cet inconnu la fixait-il ainsi ? Pourquoi s'avançait-il vers elle, avec ces pas mesurés ? Les yeux baissés, elle ne quittait pas des yeux le sol foulé par les pieds du jeune homme. Un pas, deux... Trois, puis quatre pas vers elle. Ses longs doigts fins effleurant le piano noir, le Piano de l'Oubli, elle recula de trois pas rapides pour se tenir à bonne distance du Serpentard. Elle avait tout, sauf confiance en ce genre de personne, surtout lorsqu'il la regardait comme ça, sa voix s'insinuant hors de ses lèvres pour prononcer des mots sans aucun sens. Il n'y avait aucun besoin de réparer une quelconque erreur, car tout cela n'était pas important.
Ennuyée, elle porta son regard vers la porte qui demeurait close, là-bas, de l'autre côté de la salle, espérant échapper au discours aussi ridicule qu'inutile que prononçait Nils avec le plus grand sérieux. Il dut constater qu'elle ne l'écoutait pas outre mesure, puisqu'il lui lança ces mots d'une voix froide :

"Pourquoi tourner ton regard vers cette porte ou cette fenètre ? Qu'est ce que cela t'apportera de me fuir ?"

Au mot "fuir", la danseuse releva vivement les yeux. Il n'y avait plus aucune gêne dans son regard bleuté, ni aucune crainte. Elle n'avait aucunement l'intention de fuir, mais l'arrogance de ce Serpentard lui en donnait l'impression... Tant mieux pour lui s'il se croyait en position de force, mais ce n'était pas le cas. Ce qu'elle lui fit remarquer d'une voix empreinte de fraîcheur.


Mais, lui coupant la parole alors qu'elle n'avait pu prononcer que quelques mots, il reprit avec un certain mépris - et ce fut autant le ton que les paroles qui déplurent profondément à Lizzie :

"Que je sois là ou pas , tu es toujours la même petite fille effrayée..."

Cette fois, c'en était trop. Le regard de la danseuse se fit plus dur que l'acier et le bleu de ses yeux se teinta de violine alors qu'elle répondait d'une voix bien trop indifférente :

"Que tu sois là ou pas ? Mais tu n'es rien, rien pour moi. Ne fais pas comme si tu me connaissais. Je ne suis plus une enfant, et je n'ai pas peur. Ni de toi, ni de quiconque dans cette école. Tu ne sais rien de moi, et je ne te laisserai rien savoir. Nous-ne-nous-ressemblons-pas !"

La colère avait percé dans ces derniers mots, et la voix d'ordinaire posée de la jeune femme avait débité la phrase comme autant de regards meurtiers. Mais déjà, Nils s'était détourné d'elle, comme en proie à un désintéressement soudain, et se dirigeait vers un endroit opposé. Bientôt plongé dans l'obscurité, il disparut presque de la vue de Lizzie. Elle allait recommencer à parler, quand un air de musique lent et fataliste coupa la parole qu'elle allait prendre.
Un frisson parcourut le dos de l'adolescente, tandis qu'elle s'avançait vers l'endroit d'où provenait cette mélodie aussi fascinante qu'effrayante. Après avoir fait quelques pas, elle s'arrêta subitement, surprise par la voix du jeune homme qui la cueillait en pleine rêverie.

"Tu es danseuse, réellement ? Mais alors, que fais-tu dans mon royaume des songes, toi qui es du monde materiel. Que fais-tu dans la maison du Dieu des instruments..."

Lizzie aurait voulu dire qu'elle était là par hasard, mais cette justification lui semblait soudain bien puérile par rapport au ton bas du Serpentard. Elle préféra donc garder le silence, et écouta, immobile, la voix de Nils s'élever de nouveau tandis qu'il continuait de jouer. Qu'est-ce que c'était que cette histoire de planètes ? Il était complètement fou. La jeune fille ne voyait aucune autre explication. Les mots suivants du jeune homme, posés sur un fond de musique, la confortèrent dans cette idée, même s'ils ne la rassuraient pas tellement :

"Tu es à ma merci...Ce serait peut-être mieux de coopérer , je peux me montrer très persuasif, tu sais..."

A sa merci ?! Il avait un problème, ce ne pouvait être que ça. Coopérer... Pourquoi disait-il ça ? Et puis cette menace, douce, chuchotée comme une confidence. Je peux te faire souffrir, mais chut, ne le répète pas surtout...
Il se leva, s'avança vers elle. Figée, la danseuse ne put faire un pas en arrière, et tout ce qu'elle trouva à répondre fut un :

"J'crois que tu es complètement fou..."

à peine murmuré, tandis qu'il élevait une main. Elle eut un mouvement de recul, mais les doigts du jeune homme vinrent se poser doucement sur sa joue, presque tendrement, sans raison aucune. Elle baissa la tête, se demandant ce qu'il lui prenait, et surtout, s'il avait entendu ce qu'elle avait dit. Ses longs cils bruns étaient baissés, mais lorsqu'elle le vit retirer sa main et la lever de nouveau, ses yeux s'écarquillèrent. Elle reçut le coup sans un mot, sans s'y attendre réellement.
Son corps bascula en arrière, et ses lèvres entrouvertes laissèrent échapper un léger gémissement de douleur. Elle se retrouva à terre, la tête baissée, ses longues boucles brunes dissimulant son visage à celui qui venait de la frapper aussi violemment qu'avait pu le faire sa propre mère. Reprenant sa respiration immédiatement, elle passa une main sur sa lèvre et constata qu'elle saignait ; une perle rouge avait éclos au coin de sa bouche. Elle se redressa lentement, et, se tenant très droite, écarta les cheveux qui cachaient ses yeux. Aussitôt que son champ de vision fut libre, elle darda un regard plein d'incompréhension sur le jeune homme, et recula de quelques pas, le coeur battant si fort, si fort... Pour la première fois depuis longtemps, elle se sentait en danger. Cette prison, ce bouclier de glace qui l'entourait se fendillait. Elle respira le plus lentement possible et contempla silencieusement cet adolescent qui venait de la jeter à terre, ainsi que l'avait fait sa propre mère. Ses mains tendues derrière elle trouvèrent soudain le bord du piano, auquel elles s'aggripèrent.
Lizzie sentait encore le sang au bout de sa langue. Du bout du pouce, elle essuya sa lèvre teintée de rouge écarlate, toujours sans dire un mot. Elle se retrouvait telle qu'elle ne l'avait plus été depuis si longtemps... Faible. Mais pourtant, elle réussit à souffler d'une voix parfaitement maîtrisée :

"Tu ne réussiras pas à m'écraser, pas comme ça.

Un mince sourire vint éclaircir son visage, qui était un peu plus pâle depuis qu'il l'avait frappée. Elle quitta sa position affalée et cessa de se soutenir pour être droite à nouveau, son regard parfaitement bleu à nouveau plongé dans celui, très gris, de Nils.

La jeune fille se relevait, bravache, un sourire aux lèvres.

"Tu ne réussiras pas à m'écraser, pas comme ça."


Le jeune homme était relativement impréssioné.Il doutait qu'on puisse battre sa peur par des mots, mais la jeune femme ne faisait pas que lancer des paroles en l'air.De toute façon, la force ne semblait pas le bon moyen pour mettre la jeune fille à sa merci.Une idée commença à germer dans l'esprit de Nils.Puisque la Douleur ne déliait pas la langue de la jeune fille, peut être que la honte et le remord s'en chargerait.

"Je vois que tu as beaucoup de Volonté.C'est bien.J'aime ça."

La lèvre de Nils, elle aussi , esquissa un sourire.Son "Absolutisation" comme il l'appellait, l'avait quittée.Il se sentait à présent un être ordinaire, rien à voir avec l'extase qu'il avait ressenti lorsqu'il se sentait le plus puissant... Mais il en voudrait jusqu' à sa mort , de cette Absolutisation.C'était en quelque sorte sa drogue.Il rendait tout comme absolu.Toute douleur était absolue, dans le temps, dans l'espace et dans la sensibilité.Tout bonheur semblait dérisoire face à ce moment ou il semblait qu'il était jouet d'une inspiration divine.Alors , il chercherait jusqu'à sa mort.Et il cherchera à la vaincre, par l'Absolutisation.Par cet etat de grace, tout peut etre changé.Tout.

Chaque être humain possède sa tentation.Le seul moyen de s'en débarrasser est soit d'en choisir une differente, soit d'y succomber.Nils avait choisi le deuxième choix, evidemment.Et , comme vous venez de vous en appercevoir, ce choix n'était pas des plus reposant pour son entourage direct.

"Tu peux partir.Tu ne sers plus à rien.Et je te laisserais vivante , si tu veux le savoir.Tu es une bonne à rien , comme dit precedemment, tu me ressembles... En tout point.Mais, néanmoins, félicitation pour ta force de Volonté.Il faudras que tu me dises d'où cela vient.J'en aurais besoin."

Ce personnage fascinait Lizzie. Le Serpentard était différent de toutes les sortes de personnes que la danseuse avait pu côtoyer, à cause de la manière dont il considérait les choses - comme chacune ayant une destinée bien précise. Si ce garçon ne croyait pas au destin, alors il ne devait croire en rien.
Il l'observait maintenant avec une once de respect, comme si les dernières paroles de la jeune fille l'avaient impressionné. L'adolescente soutint le regard qui la scrutait, qui la jugeait. Elle avait l'impression que de cet examen dépendant le moment où elle pourrait enfin sortir de cette pièce. D'abord pensif, le regard couleur acier du jeune homme sembla s'éclaircir, comme s'il venait d'avoir une idée. Très attentive à chaque expression de ses interlocuteurs, Lizzie aimait s'amuser à deviner ce qu'ils avaient en tête. Et ce qu'elle voyait là ne plus laisser présager rien de bon pour elle.

La jeune femme faisait ça depuis qu'elle savait mentir. Laisser croire que rien ne la touche, qu'aucun des mots ne saura l'anéantir. Elle avait perfectionné son art jusqu'à en faire une véritable protection - qui pouvait aussi être considérée, face à certaines personnes, comme une arme. Peut-on frapper avec un bouclier ? Si elle réussissait à faire vaciller légèrement cet adversaire-là, jamais elle ne le ferait tomber, et elle le savait parfaitement. La respiration très calme, elle l'observait avec une sorte d'attention polie, attendant qu'il daigne lui répondre, lui faire part de ses impressions. Ce qui ne tarda pas. Il semblait à présent la considérer un peu plus comme une "égale" que comme quelqu'un qu'il avait à sa merci... Du moins, c'était ce que croyait Lizzie.

"Je vois que tu as beaucoup de Volonté. C'est bien. J'aime ça."

Quelque chose venait de changer. Lizzie ne savait pas si c'était dans son regard, dans son maintien, dans la façon dont il lui souriait. Non, quelque chose l'avait quitté, aussitôt remplacé par une sorte de flamme fanatique dans son regard. La jeune fille se replaça aussitôt sur ses gardes : elle connaissait cette sorte de flamme, c'était ce qui donnait foi, ce qui donnait la certitude que l'on détenait sa seule vérité. C'était ce qui donnait la force de faire souffrir.
La danseuse, au lieux de s'éloigner du jeune homme comme elle en mourait d'envie, fit quelques pas vers lui, car à présent elle était sûre, sans vraiment savoir pourquoi, qu'il ne la toucherait plus. Mais la voix de son vis-à-vis la stoppa alors qu'elle n'était plus qu'à deux pas de lui. Cette fois, il s'exprimait avec une sorte de pitié si méprisante que l'adolescente se prit à haïr ses mots dès qu'elle les entendit.

"Tu peux partir. Tu ne sers plus à rien."

Les mots suivants la choquèrent encore un peu plus, si c'était possible. Quoi ?! Monseigneur, dans son extrême bonté, la laisserait vivante ? Elle n'était qu'une bonne à rien ? Oh, Monseigneur, dans son extrême modestie, avouait qu'il lui ressemblait. En tout point. Alors qu'elle allait répliquer de manière passablement véhémente, il poursuivit, comme s'il lui laissait un point. Il admirait sa volonté, et lui demandait de la lui apprendre. Il en aurait besoin.
Ces dernières phrases bloquèrent les mots de Lizzie qui allaient franchir ses lèvres. Elle le contempla avec une surprise teintée d'incompréhension. Un instant, elle fut tentée d'oublier tout ce qu'il venait de dire, de lui avouer qu'elle n'était pas si forte, de... Mais non. Il l'avait frappée, jetée à terre, méprisée. Elle s'approcha de lui, et lui répondit à mi-voix :

"Tu ne réussiras pas à m'apitoyer sur ton sort, tu sais... Si on se ressemblait vraiment, alors tu aurais dû savoir que ça ne marcherai pas."

Puis elle s'interrompit, fit volte-face et se dirigea lentement vers la porte. Au moment de la franchir, elle se retourna vers lui et lui dit d'une voix plate :

"Tu es l'une de ces personnes que je ne fais plus que mépriser, tu sais. ...Je te souhaite bonne chance."

En son for intérieur, elle se demanda si Nils allait répondre, s'il allait se fâcher, ou adopter la même tactique qu'elle : l'indifférence. Elle tourna lentement la poignée de la porte, pour laisser le temps au jeune homme de répondre s'il le souhaitait. C'était tout de même une personne tout particulièrement fascinante, elle n'allait pas le laisser là sans se laisser une chance de comprendre comment il fonctionnait. Mais s'il gardait le silence, les jeux seraient faits, elle quitterait la pièce et ne lui reparlerait pas. Peut-être ne serait-il pas si intéressant, finalement.

Et Nils rentra à son tour dans son jeu.

"Tu es l'une de ces personnes que je ne fais plus que mépriser, tu sais. ...Je te souhaite bonne chance."


"Tu sais très bien que ce qu'il faut avoir dans la vie, c'est tout sauf de la chance.Qu'encore tu me souhaite d'avoir fait les bons choix, ou même de m'améliorer, passe encore.Mais si tu crois que tout ma vie va reposer sur une simple histoire de chance, tu te trompes.Toi et moi ne laissons rien à la chance.Tout doit être minutieusement préparé.Certains nous traiteront de machines ou de robots, à leur aise.Je pense que nous sommes juste perfectionnistes.Et être perfectionniste, c'est ne rien laisser à la chance.Pas même le privilège de faire notre gloire."




A nouveau le jeune homme s'approcha de la fille Lunaire.Lentement, il la sentit se crisper mais la rassura d'une sorte de grognement pacifique.Nils passa lentement sa main dans les cheveux èbènes et raides de la jeune fille.

" Qu'est ce qui t'empèche de me hair ? Une part de ta pitié pour moi s'appitoye.Quelle en est la cause ? Est ce parce que nous avons le même but ? Et d'ailleurs, quel est le tien ? Si ça se trouve, tu n'en as même pas... Pauvre petite chose idiote..."

Un rictus déformait le visage de Nils.Pourquoi le jeune homme prenait du plaisir à détruire, à chercher son absolutisation ? Tout simplement car si il voulait effacer sa peur, le monde devait être vide.Car , si rien n'existe, on ne craint jamais sa fin... Tout le monde devrait devenir sans âme.La peur était présente dans le coeur de chaque humain depuis sa naissance.Or , le Néant était une possibilité pour l'annuler.Si rien n'est jamais, alors qu'est ce qui peut devenir ? Qu'est ce qui peut souffrir , et mourir ? Rien.Le Vide était necessaire à l'humanité.C'était la mission de Nils de s'assurer que tout disparaisse bien sans traces... Il devait à tout prix laisser un vide absolu. L'absence de pensée était la plus belle chose qui pouvait arriver à l'humanité. Mais chaque chose viendrait en son temps.

Il aimait ce visage.Profondément.Il avait trouvé quelqu'un qui ressentait ce qu'il avait en lui.Pas qui le comprenait, ou même pensait comme lui , c'était impossible.Mais , au moins , la jeune fille le ressentait profondément.

Le bout des doigts de Lizzie était toujours négligemment posé sur la poignée de la porte. Une longue boucle brune dissimulait son visage et la mimique mi agacée, mi amusée qui naissait sur ses lèvres. Jusqu'où irait-il dans ses folies, dans ses mots sans sens, dans son égoïsme qui allait dans son esprit jusqu'à la plus avare des générosités : la possession ?!
Il l'englobait dans ce "nous" repoussant qu'il prononçait sans cesse, ce "toi et moi" si indésirable pour la jeune fille. Elle secoua légèrement la tête, ne se retournant pas alors qu'il finissait son discours. Elle n'avait pas envie de lui répondre, mais elle lui précisa pourtant d'une voix fraîche :

"Tout ce que tu dis peut être vrai. Ce n'est pas à toi de m'en convaincre, si je ne le suis pas déjà. Alors ne m'ajoute pas à ce 'nous', il n'y a aucun 'toi et moi', et rien de ce que tu diras ne pourras me persuader du contraire."

Son regard d'un mauve flamboyant de rancune était fixé sur le bois de la porte, à quelques millimètres de son front. Tout en elle martelait les mots qu'elle avait prononcé auparavant. Nous ne nous ressemblons pas. Elle tenta de retenir des mots qui frappaient ses lèvres, des mots qu'elle aurait regretté. Son autre main, celle qui n'était pas posée sur la poignée de la porte, se serra jusqu'à ce que les ongles blancs de la jeune femme s'enfonce dans sa paume et y impriment des marques parfaitement visibles. Mais bientôt, la colère eut raison d'elle et Lizzie se retourna brusquement, juste à temps pour voir Nils s'approcher d'elle.
Elle eut aussitôt un mouvement de recul, et la méfiance lui redonna assez de force pour repousser l'accès de fureur qui l'avait prise un instant. Il était trop près. Il éleva une main vers elle, mais cette fois, elle ne recula pas. S'il voulait frapper, qu'il frappe. Il ne la ferait jamais plier ainsi, elle ne craignait plus la douleur.
Mais non. Sa paume caressa légèrement la longue crinière brune de la danseuse, comme s'il tentait de la rassurer. La rassurer ? Pour qui se prenait-il donc ? Elle n'avait pas peur de lui. Elle aussi éleva une main, mais ses doigts attrapèrent le poignet du jeune homme et le forcèrent à abaisser son bras. Elle siffla d'une voix glaciale :

"Ne me touches pas."

Elle voyait bien pourtant cette lueur de douceur, cette lumière inoffensive dans le regard gris du jeune homme. Mais rien à faire, elle s'en fichait complètement. Les paroles du Serpentard l'enfoncèrent un peu plus dans son état. Non, elle ne s'apitoyait pas sur lui, non, aucune part d'elle ne...
Mais elle ne put s'empêcher de penser qu'il n'avait pas si tord que cela. Effectivement, sans qu'elle puisse déterminer pourquoi, une part d'elle se demandait comment cet adolescent aux yeux d'un gris acier avait pu devenir si froid, si brutal, si méchant. Elle lâcha son poignet et pressa ses paupières sur ses prunelles pour effacer ces mots qui s'y insinuaient : il s'agissait juste de pitié, en aucun cas de sympathie. Lizzie se sentait comme un savant un peu fou qui étudierait un comportement qu'il trouverait étrange.
Elle tourna le dos au jeune homme et, secouant la tête comme si elle se décevait elle-même, renonça - pour le moment - à quitter la pièce. Elle alla s'adosser au mur, puis se laissa glisser jusqu'à terre, face à Nils. Son regard avait retrouvé cette lueur bleuté à peu près sereine, et fixait le visage du jeune homme, épiait ses moindres réactions, ses moindres gestes, ses moindres regards. Elle laissa passer quelques longues secondes de silence, puis s'adressa à lui comme on s'adresse à un petit enfant à qui on veut faire montre de bonne volonté :

"Bon. Puisque tu as l'air de vouloir parler, vas-y, parle."

Elle hésita légèrement, puis, d'une voix peu sûre d'elle, lâcha comme à regret :

"...Peut-être pourras-tu me convaincre qu'on se ressemble plus que je ne le pensais."

Qu'est-ce qui l'avait poussée à dire cela ? Ces mots, la jeune fille les regretta aussitôt qu'elle les prononça. Se mordillant la lèvres, les sourcils froncés, elle se résigna pourtant à ne pas se contredire - elle aurait l'air terriblement idiote ! - et attendit une quelconque réponse de l'autre.

[ HJ Désolée, ce post est nul, je l'ai fini vite fait au CDI >< ]

La jeune fille semblait peu amène à s'abandonner.Etait-ce la proximité de ces instrument maudits ? Ceux-ci se mirent à se déplacer dans les airs en entamant une symphonie ressemblant de près à la Sarabande d'Haendel.

"Bon. Puisque tu as l'air de vouloir parler, vas-y, parle."

"Ecoute , j'ai peu de choses à dire, mais elle sont indispensables... Ces instruments s'expriment pour moi , je vais juste te retranscrire le message qu'ils t'imposent.Depuis quelque temps, les humains pensent qu'il peuvent dominer l'Ecrit , les Ecrits et surtout le livre du Destin.Certains ne se contentent plus de vivre pour eux, certains inovent ,dans ce que vous appellez le " bon sens ". Tu as ces mêmes idées.Je voulais juste te dire que la Fatalité existe toujours , et tu dois t'y fier.Certains écrivains de la Renaissance ont clamé trop vite que l'homme etait perfectible.Je n'y crois pas.Cependant, il essaye et court à sa perte.Je ne fais que vous prevenir, mais si vous ne voyez pas les dangers qui se profilent, je serais forcé de m'imposer par d'autres moyens.Ce n'est pas pour me plaire, crois moi.Je n'ai rien d'un sadique.Disons que j'aime le travail quand il est bien fait et proprement fait , voilà tout.Je suis un peu maniaque , en quelque sorte."


La jeune fille semblait serrer les dents alors , Nils leva la tête et fit une de ces horribles grimaces dont il a le secret, tout en ricanant tout haut.L'important était que ce moment reste gravé dans sa mémoire comme une blessure au fer chaud.
D'ailleurs, Nils se croyait être le berger de ce troupeau égaré qu'on appelle les humains.Ceux-ci ne peuvent marcher tout seuls , il leur faut des chiens pour les motiver et fatalement, un berger qui sache ou et quand punir , afin que ces moutons ne puissent avoir une fin aussi misérable que ceux de Panurge.

Un jour, un homme malveillant était venu acheter un mouton à ce pauvre Panurge.Celui-ci, interloqué lui demanda pourquoi il n'avait choisi qu'un mouton , et pourquoi celui-là ?
Sans répondre, l'étranger prit le mouton et le balança dans la rivière qui bordait le paturage.Tout les autres moutons, comme pris de panique , se précipitèrent à la poursuite de leur camarade dans la rivière.Tous perirent noyés, sans exeptions.
Et enfin , l'étranger daigna répondre, en se retourna , il ricana : " C'était le meneur de ton troupeau , voilà pourquoi..."

Et Nils se figurait être le Meneur et Guide de cette race un peu grégaire qu'est l'être humain.